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L’AUTOFICTION ET LES FEMMES : VERS UN ALTRUISME ?

Mon propos porte sur l’autofiction féminine contemporaine principalement à travers des œuvres de Camille Laurens, Catherine Millet, Chloé Delaume, Christine Angot et Sophie Calle.

La spécificité du genre et sa portée novatrice résident dans l’exploitation consciente de la fiction à l’œuvre dans tout récit de soi : l’autofiction est une « fiction d’événements et de faits strictement réels » selon la définition de Doubrovsky.

A rebours des nombreuses études faites jusqu’ici sur l’autofiction sous l’angle du « dévoilement de soi », ma lecture vise à mettre en lumière la distance prise ainsi par rapport au « moi » identitaire au profit de l’adresse à l’autre, au lecteur, pour approcher ensemble la réalité vécue de la relation humaine : loin d’être nombriliste, l’autofiction serait un chemin vers l’altruisme.

Les productions autofictionnelles travaillent une question cruciale de notre époque qui est celle de l’identité dont les effets en termes de communautarismes ou de différence des sexes se manifestent dans l’actualité et dont elles exhibent les leurres.

Les femmes, portées sans doute par leur histoire à se jouer des artefacts traditionnels du moi identitaire qui leur ont été imposés, y ont une place particulière.



Résumé du livre

Le principe vital de l’autobiographie depuis Rousseau est l’acte d’imposer à autrui, avec sans doute de moins en moins d’assurance, au prix d’un dévoilement total, sa propre représentation des hommes et des choses. Pour que le moi existe, pour que le monde évoqué soit une réalité et non un délire, il faut en effet le faire partager par le lecteur, lecteur réel, sceptique, irrité, compatissant comme tout interlocuteur dans la vraie vie. L’autofiction comme conscience du « mentir-vrai » dans tout récit de soi pose avec acuité la question de l’adhésion du lecteur, à la fois nécessaire et d’autant moins exigible que l’autofiction se permet de ne pas respecter strictement l’exactitude  biographique.

  • Chapitre I : « La langue du roman actuel : de la fiction à l’autofiction, l’interpellation au cœur de l’écriture ». La voie la plus usitée, conforme à l’individualisme dominant dans nos sociétés, est sans doute celle de l’interpellation du lecteur qui est au cœur de la fiction contemporaine comme de l’autofiction : il s’agit de le prendre à parti, de l’inciter à accepter la vision du monde du « je ».

  • Chapitre II « Plagiat psychique, la querelle Camille Laurens- Marie Darrieussecq ». Le monde littéraire est plus que jamais un lieu d’exposition et d’attaque, ce qu’a illustré une querelle récente largement médiatisée.
     

 

  • Chapitre III «  Un avenant au pacte autobiographique : la dimension interlocutoire de l’autofiction ». Mais au-delà se profile la voie d’une éducation du lecteur, l’émergence d’un avenant en quelque sorte au fameux pacte autobiographique : dire « la vérité, toute la vérité » sur soi est devenu problématique, voire impossible et ne peut être en tous cas garanti par l’engagement de l’auteur à s’en tenir rigoureusement à ce qui s’est réellement passé dans sa propre vie.
     

 

  • Chapitre IV « La famille autofictive de Sophie Calle, famille intersubjective idéale ». L’art plastique, tel celui de Sophie Calle, a sans doute l’avantage d’opérer visuellement la transformation des rapports auteur/ lecteur dans le sens d’une intersubjectivité en allant jusqu’à inverser le « je » et le « tu » dans son exposition « M’as-tu vue ? ».  
     

 

  • Chapitre V «  L’autofiction comme performance : de La Vie sexuelle de Catherine M. à Jour de souffrance ou la confrontation du lecteur aux leurres de la lisibilité du moi ». La forme artistique de la performance littéraire chez Catherine Millet confronte le lecteur à l’illusion de tout dévoilement de soi.
     

 

  • Chapitre VI «  Le Livre des Ecritures de Soi : Inceste de Christine Angot ou la voie mystique de communion avec le lecteur. Aux confins du lisible et du visible, il reste à l’autofiction à engager le lecteur dans l’aventure mystique de la présence de l’insaisissable, de l’irreprésentable par le Livre des Ecritures de Soi.

 

  • Chapitre VII « Le lecteur au centre du livre : Rendez-vous de Christine Angot », chapitre VIII «  De l’intime à l’intimation : « l’autofixion de Chloé Delaume ». Ou bien il s’agit de donner Rendez-vous au lecteur de gré ou de force dans le laboratoire intersubjectif de l’autofiction chez Christine Angot ou Chloé Delaume .

     

  • Chapitre VIII «  Le lectorat féminin de Sophie Calle : Prenez soin de vous ». Enfin, la concrétisation d’un lectorat féminin par Sophie Calle dans son œuvre Prenez soin de vous permet de subodorer la place éminente dévolue aux femmes dans la démarche autofictionnelle de remise en cause des clivages du moi et de l’autre.

 

Ce livre est donc un essai qui sort du champ proprement littéraire pour viser un large public actuel des productions autofictionnelles : il permet de préciser les questions contemporaines existentielles qui sont attachées à l’intérêt que cette forme contemporaine d’autobiographie suscite sous forme d’engouement ou de rejet et que signale la vogue du mot « autofiction ».

Page représentative de l’ensemble du manuscrit :

Il y a quelque chose et il y a quelqu'un: face à face.
 
En d'autres termes un sujet, un ego face à un réel qu'il appréhende en le nommant, en se le représentant et qu'il aménage en réalité à son usage.

Réalité qu'il construit à travers le temps et sa propre histoire, autant dire en fiction, en autofiction.

Désormais nous réapprenons, par les voies modernes de la science qui imprègne si fortement la psychanalyse, la conscience de nos romans personnels.

Trop personnels: pas plus que le monde ou plutôt les mondes issus de notre pensée apparemment la plus objective, la pensée scientifique, ne peuvent être crédibles sans un assentiment commun, l'autofiction ne peut se passer de l'adhésion de l'autre, en l'occurrence du lecteur.

Le principe vital de l'autobiographie traditionnelle est l'acte d'imposer à autrui, avec sans doute de moins en moins d'assurance, au prix d'un dévoilement total, son autoreprésentation des êtres et des choses.

L'autofiction s'en démarque nettement par la pleine conscience de la construction, fiction à l'oeuvre dans tout récit de soi et paradoxalement de la nécessité de la faire partager à autrui.

Dimension nécessaire, peu explorée à cause de la fascination pour l'expression du moi.

Dimension fondamentale: l'autofiction ne serait pas principalement une ego-fiction mais une alter-fiction.

Dimension qui remet en cause les limites de l'identité, de soi, des choses: un chemin vers l'altruisme ?

L'acuité avec laquelle se pose alors la question des clivages établis, dont la dichotomie du masculin et féminin pourrait être la base, est sans doute à relier à la place particulière qu'y ont prise les femmes.

 
Table des matières
 
I- De la fiction à l'autofiction: l'interpellation au coeur de l'écriture contemporaine.
 
II- "Plagiat psychique": la querelle Camille Laurens-Marie Darrieussecq.
 
III- Un avenant au contrat autobiographique: la dimension interlocutoire de l'autofiction.

 

IV- La famille autofictive de Sophie Calle, famille intersubjective idéale.
 
V- "Ultimate autobiographie: de La Vie sexuelle de Catherine M. à Jour de souffrance ou la confrontation du lecteur aux leurres de la lisibilité du moi.
 
VI- Le Livre des Ecritures de Soi: L' Inceste de Christine Angot ou la voie mystique de communion avec le lecteur.
 
VII- Le lecteur au centre du livre: Rendez-vous de Christine Angot.
 
VIII- De l'intime à l'intimation: 'l'autofixion" de Chloé Delaume.
 
IX- Le lectorat féminin de Sophie Calle.


 

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